Revue de presse et point sur la politique belge à moins d’un an des élections générales

Avanti populo!

Revue de presse et point sur la politique belge à moins d’un an des élections générales

Tiens, il se passe quelque-chose!

L’article La Belgique tiraillée entre une Wallonie de gauche et une Flandre de droite, concernant les élections proches, paru sur le site LVSL m’a paru à ce point truffé de préjugés malgré son intérêt qu’une mise au point me semble sinon nécessaire, du moins utile. C’est aussi l’occasion de faire le point.

D’abord la Belgique n’est pas tiraillée entre une Flandre de gauche et une Wallonie de droite. Elle est tiraillée parce qu’il y a une partie du pays qui semble de gauche. Ce n’est pas la même chose. Tous les pays qui sont un tant soit peu à gauche ont un tas d‘ennuis. Ceux de droite aussi, mais pas les mêmes. Les gouvernements des grandes puissances capitalistes ne passent pas leur temps à leur faire des recommandations. A saper leur économie. A provoquer des poussées inflationnistes. A favoriser les pays voisins. A en faire des vitrines de la réussite économique. Si la Belgique était complètement de gauche, elle serait encore bien plus tiraillée. Selon moi, ce titre est tendancieux.

S’il y a des crises en Belgique, ce n’est pas parce qu’il y a une partie du pays à gauche et une partie du pays à droite. C’est parce qu’il y a une partie importante du pays à droite. Cette droite provoque des crises pour arracher des concessions à la gauche. La fragmentation des forces et le morcellement empêchent que la Belgique ne se retrouve dans la même situation que les pays qui sont beaucoup plus à droite. Il n’y a pas en Belgique de tradition parlementaire telle qu’une opposition peut non seulement subsister mais exister sans un tel morcellement. L’autonomie communale, l’autonomie régionale, bref une certaine concurrence, sont la condition d’une certaine évolution.

Il y a une extrême-droite indépendantiste et une droite extrême confédéraliste en Flandre. Tout n’est pas non plus joué à ce niveau. L’indépendantisme n’est pas la force dominante en Flandre. Le fédéralisme a au moins autant de supporters que le confédéralisme et l’indépendantisme.
Quant au PTB en Wallonie, il représente surtout les mécontents. Ceux que la politique en vigueur ne satisfait pas. Ceux qu’elle déçoit, qu’elle laisse de côté. On ne peut pas dire que la gauche traditionnelle ait beaucoup défendu les travailleurs. Elle est plutôt accrochée aux basques des multinationales. Il y a du mécontentement. Et le PTB n’est pas forcément la seule force qui intéressât les mécontents. Mais c’est la principale à l’échelon politique à tenter de les fédérer et à proposer une alternative au néolibéralisme pur et dur. S’il existe un peu en Wallonie, c’est surtout parce qu’en Flandre, la droite ultralibérale cartonne, et qu’elle impose sa politique au reste du pays. On sait comment sont jugées et traitées les alternatives au néolibéralisme qui ont la moindre chance de percoler. Toute l’univers médiatique se met à raconter des salades à leur sujet et la perspective d’un coup de force de droite subitement l’emporte. On l’a vu en Grèce en 2015. Toutes les puissances économiques et les gouvernements capitalistes se sont coalisés pour écraser l’alternative qui a tenté de se mettre en place. Le gouvernement grec a subitement renoncé à poursuivre dans la voie qui était la sienne. Il a viré de bord, changé de cap. Ensuite, on n’a plus parlé de la Grèce que les grands fonds d’investissement ont pillée dans l’intervalle. Le seul fait que l’Ukraine ait refusé de conclure un traité économique avec l’Union européenne a entraîné un coup d’état et ensuite une guerre dévastatrice.

La suite de l’article mériterait un développement mais ce dernier risque d‘être particulièrement long. Un peuple sans intelligence politique. Les créatures les plus insupportables qui soient. Une certaine apathie. Léopold avait une jolie opinion de la Belgique. Je dirais au contraire: un peuple dont l’intelligence politique ne compte pas, n’a jamais compté. Et qui a pourtant réussi à préserver son unité. Au milieu de pays presque toujours en guerre, auxquels la bêtise sert de sauf-conduit, et passe pour de l’intelligence. Dans ce marigot de puissances dominatrices, dont la moindre idée sert de boussole au monde entier, les Belges ont réussi à inventer un système basé sur ledit droit où des représentants des plus riches, des professionnels, forment un gouvernement qui traitent avec les puissants. Le fait que, sur certains points, de simples représentants aient barre sur les ducs et les princes irritait ce junker plus proches des despotes que de la démocratie. La folie politique des Belges dans la mesure où elle a été influencée par ce despote et surtout par sa descendance, a cependant causé d’énormes dégâts à tout un demi-continent. Ces dégâts ont considérablement enrichi ce petit pays au point d’en faire la 5ème puissance économique du monde à l’approche du vingtième siècle. Ce petit pays a quand même extirpé ce demi-continent de la préhistoire. Il a mis fin à cette expérience quand les dérives qu’elle a entraînées ont paru inacceptables. Si un phénomène a causé des dégâts à son économie, et provoqué des crises à répétition, ce sont ces dérives, c’est cette économie tributaire des ressources d’une autre partie du monde. Empêché de traiter le monde du travail comme une bête de somme, et, empêché d‘exploiter à son profit exclusif les ressources de tout un sous-continent, ce pays ne s’est pas étiolé pour autant. Il a simplement partagé les ressources de ce sous-continent avec d’autres puissances tributaires des ressources d’autres pays et d’autres peuples comme lui en mettant sur pied des institutions internationales et de grandes organisations économiques qui lui permettent de persister à exploiter ces ressources. Mais ce faisant il est devenu une partie de plusieurs ensembles qui se recouvrent en partie et qui régissent ce qui était auparavant le seul apanage de la puissance étatique nationale. Le concept de nation a changé de sens sans toujours que les gens ne s’en rendent compte. Mais ce petit pays est devenu le siège de quelques-unes des plus importants d’entre eux. D’une alliance militaire, celle des puissances occidentales, et du super état européen.

La nation n’est donc pas considérée comme une curiosité historique. Elle en est une. Ses réalités ne sont pas négligées, elles sont obsolètes. De quelle indépendance la Flandre se prévaudrait-elle au sein du super état européen, régi par une kyrielle de traités économiques. D’où sort ce nationalisme de mauvais aloi ?

L’état failli le plus prospère au monde, ce sont les USA.. Pas la Belgique. Ne confondons pas tout. Mais disons que c’est le second état failli le plus prospère, et cela sans avoir à son service une armée dont l’entretien coûte mille milliard de dollars par an, bref le budget militaire des quinze plus grandes puissances militaires après les USA. Le budget militaire de la Belgique est de moins d’un milliard d’euros par an. Et elle a des troupes dans une dizaine de pays étrangers quand même, dont l’Ukraine, autrement dit la Russie. Les soldats belges qui se battent en Ukraine comme la fameuse division ss « Wallonie » se battant aux côtés des nazis trois-quarts de siècle plus tôt ont soi-disant démissionné de l’armée. Mais ce n’est pas le cas des soldats belges qui opéraient en Syrie, qui opéraient il y a peu en Afghanistan, et bien sûr en Afrique, notamment au Congo et au Mali. Il n’est pas toujours aisé de nager à contre-courant surtout quand l’essentiel de ses ressources proviennent du reste du monde.

Est-ce que cela rend les perspectives électorales de 2024 plus sombres que les autres ? Non. Comme partout l’extrême-droite a le vent en poupe. Comme partout le moindre succès de l’extrême-gauche expose à des retours de manivelle de la part des grandes organisations économiques, des super-états qui font partie des mêmes ensembles que la Belgique. Comme partout cette situation fragilise une partie de la population, en exaspère une autre, et en réjouit une troisième, et bloque la situation. Il est donc faux que la Belgique est une démocratie partisane bloquée. Toutes les démocraties sont partisanes et elles sont toutes bloquées, plus ou moins pour les mêmes raisons : le maintien et si possible l’accroissement du taux de profit. Quant à savoir si cet accroissement peut se produire en permettant aux patrons flamands de surexploiter la main d’œuvre wallonne, c’est une autre affaire. Pour les Belges, la situation n’a jamais été simple. Des guerres terribles l’ont dévasté. Surtout du quatorzième au dix-huitième siècle. Et puis, il y a eu les guerres napoléoniennes qui se sont déroulées en partie en Belgique. Et ensuite, un siècle plus tard, les occupations allemandes. Entre-temps, une révolution. Les régimes politiques se sont constamment transformés.

Les Belges ont à la fois un très bon et un très mauvais souvenir de la fin du dix-neuvième siècle, quand sur un plan économique la prospérité était au rendez-vous, mais aussi quand la main d’œuvre de toute la Belgique s’est vue transformée en bête de somme. Est-ce qu’il n’existe pas de moyen terme entre l’exploitation féroce, et la misère de masse, et l’endettement et la démocratie ? Ne pourrait-on cesser de stigmatiser les migrants, les chômeurs, et les pauvres en général, au lieu de pointer du doigt un terrorisme islamique oh combien compréhensible, les immigrés ayant servi de bêtes de somme à la place des Belges depuis pratiquement la fin de la seconde guerre mondiale ? Ne pourrait-on privilégier le concept de coopération plutôt que l’idée de subordination et toutes les dérives qu’elle implique qu’on finit toujours par résoudre lorsqu’elles deviennent intolérables en provoquant notamment des crises, en tablant sur la guerre, et dans ce cas sur la dictature.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *